Côte-d'Or : les agriculteurs se forment à Facebook pour lutter contre "l'agribashing" et s'ouvrir des débouchés

La chambre d'agriculture de la Côte-d'Or proposait une formation pour apprendre aux agriculteurs à maîtriser Facebook, ce mardi 24 février. Eux veulent s'en servir pour élargir leur clientèle et proposer une autre image de leur métier.

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"Jusqu'ici j'utilisais des flyers pour faire la publicité de mon élevage". Les techniques marketing de Laëticia Chabanel, éleveuse à Détain-et-Bruant (Côte-d'Or) ont été rendues désuètes par l'application des gestes barrières depuis l'épidémie de Covid-19. Celle qui se décrit comme "pas douée en informatique" a souhaité se parer d'une identité en ligne, comme de nombreux commerces, souvent par le biais du géant Facebook.

Pour ne pas louper ce train, déjà presque au bout du quai, elle a choisi de venir à la formation de la chambre d'agriculture de la Côte-d'Or. Celle-ci a pour but d'aider les agricultures à mieux communiquer sur le réseau social. Ce 24 février, huit agriculteurs étaient réunis dans la pénombre d'une salle de leurs locaux, situés dans la commune de Bretenière.  

Faute de temps, la communication souvent négligée

A la sortie de la formation, tous auront au moins une page Facebook pour leur exploitation, charge à eux ensuite de l'alimenter. Le niveau de connaissance entre les élèves du jour variait, entre ceux qui n'utilisent pas de réseaux sociaux à titre personnel et les autres, venus chercher un approfondissement. "Je souhaite me perfectionner pour mieux promouvoir ma vente de fraises à la ferme. Facebook c'est plus important que d'avoir un site internet", lance Antoine Bethery, propriétaire de la Fraise d'enfer à Aigremont (Yonne). Compte tenu de la popularité du réseau social, y être c'est tenter d'avoir pignon sur rue. 

Véronique Laville, agricultrice à Tanay, raconte que de nombreux clients lui demandaient à être renseignés via les réseaux sociaux sur son activité de vente d'endives en circuit court. "Ils voulaient savoir quand la ferme était ouverte, où la trouver et si la saison avait commencé", précise-t-elle. A la fin de la formation, en plus de ces renseignements de base, elle projette de partager des photos de la vie quotidienne de son entreprise. 

Comme ils sont quotidiennement plongé dans l'activité de leur exploitation, ils pensent que leur métier n'est pas intéressant pour les autres.

Alexandra Bollaert, formatrice.

Les agriculteurs ont envie de faire connaître leur activité mais ils n'osent parfois pas se lancer. "Comme ils sont quotidiennement plongé dans l'activité de leur exploitation, ils pensent que leur métier n'est pas intéressant pour les autres", témoigne d'expérience Alexandra Bollaert, la formatrice, venue de la chambre d'agriculture de l'Aube pour distiller ses conseils. 

Ils sont également souvent pris par les multiples activités que demande la gestion d'une exploitation : "par manque de temps, certains agriculteurs ne s'investissent pas dans la communication", répète Alexandra. Mais depuis la petite dizaine d'années qu'elle navigue entre numérique et agriculture, elle voit les choses changer : "certains se débrouillent très bien tout seul". 

Peut-être faudrait-il dire "certaines". Dans l'assemblée ce 24 février, sur les huit personnes présentes, sept sont des femmes. "Normalement, la différence n'est pas aussi importante, mais la majorité des personnes que je côtoie à cette formation sont des femmes", nuance la formatrice.

Proposer une nouvelle image de l'agriculteur

Qu'importe leur sexe, en s'exposant sur Facebook, tous les agriculteurs souhaitent la reconnaissance de leur labeur par le grand public, au-delà de la prospection de clients que cela peut symboliser. Ils ne veulent pas que les seuls débats sur le bio, la condition animale ou la surconsommation de viande monopolisent la représentation de leur travail. Bref, donner un pendant enviable à "l'agribashing".

"Les agriculteurs ont souvent le sentiment que les récits qui sont faits de leur métier ne correspondent pas à leur réalité", expose Stéphane Aurousseau, éleveur de vaches charolaises dans la Nièvre. Il est également vice-président de #agridemain, un mouvement qui souhaite donner la parole aux agriculteurs. "Je les encourage vivement à dire comment ca se passe réellement s'ils ont ce sentiment-là, chacun avec sa stratégie". Lui a réussi à réunir 1.725 "followers" sur son compte Twitter. Il s'astreint à partager tous les jours un mot ou une photo à propos de la vie de son exploitation avec le mot-dièse #laviedelaferme.

"L'agriculteur doit devenir maître de sa communication alors que de nombreux Français n'ont plus d'attaches à la terre", abonde Brice Veaulin, agriculteur dans l'Yonne, 5 500 "followers" à son actif. Il est vice-président de FranceAgritwittos, un regroupement d'agriculteurs influents sur les réseaux sociaux. L'association a même crée un petit livret des bonnes pratiques de l'agriculteur sur Twitter.

J'ai envie de donner une image réaliste et agréable de mon métier. Le grand public a besoin de voir que l'on fait notre métier du mieux que l'on peut.

Agathe Krempp, éleveuse à La Ferme O'Limousine à Flagey-lès-Auxonne.

La multiplication du nombre de suiveurs apporte aussi son lot de contraintes et de mésaventures. La formatrice leur apprend à gérer les commentaires d'utilisateurs mécontents. "Cela peut être virulent", estime l'une des agricultrices présentes, parmi les plus expérimentées. Alexandra Bollaert leur conseille de répondre aux commentaires mais de ne pas se perdre dans des débats inutiles et d'avance, vains. 

Paradoxalement, au-delà de la défiance, de nombreux consommateurs sont tentés de regarder de plus près ce qu'ils mettent dans leur assiette et se tournent vers une consommation locale. Les agriculteurs espèrent en récolter les fruits, en tissant avec eux un nouveau lien. Agathe Krempp, éleveuse à La Ferme O'Limousine à Flagey-lès-Auxonne, partage sa motivation : "j'ai envie de donner une image réaliste et agréable de mon métier. Le grand public a besoin de voir que l'on fait notre métier du mieux que l'on peut".

 

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